Le livre biblique de l’Exode présente un combat asymétrique entre le représentant sans force d’un peuple esclave, Moïse, et la puissance du Pharaon, fils des dieux de l’Egypte. Puis la supériorité se renverse, dans une situation de violence intense. Pourquoi la naissance du peuple d’Israël et du monothéisme juif devait-elle se faire dans un tel climat de violence extrême ? Quelques pistes de réponse avec l’égyptologue Jan Assmann.
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Livre de l’Exode 7,8-20 – Deuxième mission vers le Pharaon et l’eau changée en sang
8 Le SEIGNEUR dit à Moïse et à Aaron : 9 « Si le Pharaon vous parle ainsi : Faites donc un prodige, – tu diras à Aaron : Prends ton bâton, jette-le devant le Pharaon, et qu’il devienne un dragon ! » 10 Moïse et Aaron vinrent chez le Pharaon et firent comme le SEIGNEUR l’avait ordonné. Aaron jeta son bâton devant le Pharaon et devant ses serviteurs, et le bâton devint un dragon. 11 Mais, de son côté, le Pharaon appela les sages et les enchanteurs ; et ces magiciens d’Egypte firent la même chose avec leurs sortilèges : 12 chacun jeta son bâton, qui devint un dragon. Mais le bâton d’Aaron engloutit leurs bâtons. 13 Cependant, le cœur du Pharaon resta endurci ; il n’écouta pas Moïse et Aaron, comme l’avait dit le SEIGNEUR.
14 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Le Pharaon s’obstine ; il refuse de laisser partir le peuple. 15 Va vers le Pharaon dès le matin, quand il sortira pour se rendre près de l’eau. Attends-le au bord du Fleuve. Et le bâton qui s’est changé en serpent, prends-le en main. 16 Dis au Pharaon : Le SEIGNEUR, le Dieu des Hébreux, m’avait envoyé te dire : Laisse partir mon peuple pour qu’il me serve au désert ; mais jusqu’ici tu n’as pas écouté. 17 Ainsi parle le SEIGNEUR : A ceci tu connaîtras que c’est moi le SEIGNEUR : je vais frapper les eaux du Fleuve avec le bâton que j’ai en main et elles se changeront en sang. 18 Les poissons du Fleuve mourront, le Fleuve deviendra puant et les Egyptiens seront incapables de boire les eaux du Fleuve. » 19 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Dis à Aaron : Prends ton bâton, étends la main sur les eaux d’Egypte – sur ses rivières, ses canaux, ses étangs, partout où il y a de l’eau ; qu’elles soient du sang ! Qu’il y ait du sang dans tout le pays d’Egypte, dans les récipients de bois comme dans les récipients de pierre ! » 20 Moïse et Aaron firent comme le SEIGNEUR l’avait ordonné. Il leva le bâton et frappa les eaux du Fleuve sous les yeux du Pharaon et de ses serviteurs. Toutes les eaux du Fleuve se changèrent en sang.
Livre de l’Exode 11,1-10 – Annonce de la mort des premiers-nés. Conclusion sur les fléaux d’Egypte.
1 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Je vais amener une dernière plaie sur le Pharaon et sur l’Egypte. Après cela, il vous laissera partir d’ici et même, au lieu de vous laisser partir, il vous chassera définitivement d’ici. 2 Dis donc au peuple de demander chacun à son voisin, chacune à sa voisine, des objets d’argent et des objets d’or. » 3 Et le SEIGNEUR accorda au peuple la faveur des Egyptiens. De plus, Moïse lui-même était très grand dans le pays d’Egypte aux yeux des serviteurs du Pharaon et aux yeux du peuple.
4 Moïse dit : « Ainsi parle le SEIGNEUR : Vers minuit, je sortirai au milieu de l’Egypte. 5 Tout premier-né mourra dans le pays d’Egypte, du premier-né du Pharaon, qui doit s’asseoir sur son trône, au premier-né de la servante qui est à la meule et à tout premier-né du bétail. 6 Il y aura un grand cri dans tout le pays d’Egypte, tel qu’il n’y en eut jamais et qu’il n’y en aura jamais plus. 7 Mais chez tous les fils d’Israël, pas un chien ne grognera contre homme ou bête, afin que vous connaissiez que le SEIGNEUR fait une distinction entre l’Egypte et Israël. 8 Alors tous tes serviteurs que voici descendront vers moi et se prosterneront devant moi en disant : Sors, toi et tout le peuple qui te suit. Et après cela, je sortirai. » Et Moïse, enflammé de colère, sortit de chez le Pharaon.
9 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Le Pharaon ne veut pas vous écouter, si bien que mes prodiges se multiplient dans le pays d’Egypte. » 10 Moïse et Aaron avaient accompli tous ces prodiges devant le Pharaon, mais le SEIGNEUR avait endurci le cœur du Pharaon, qui ne laissa pas partir les fils d’Israël hors de son pays.
Evangile de Marc 15,1-15 – Jésus devant Pilate
1 Dès le matin, les grands prêtres tinrent conseil avec les anciens, les scribes et le Sanhédrin tout entier. Ils lièrent Jésus, l’emmenèrent et le livrèrent à Pilate. 2 Pilate l’interrogea : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus lui répond : « C’est toi qui le dis. » 3 Les grands prêtres portaient contre lui beaucoup d’accusations. 4 Pilate l’interrogeait de nouveau : « Tu ne réponds rien ? Vois toutes les accusations qu’ils portent contre toi. » 5 Mais Jésus ne répondit plus rien, de sorte que Pilate était étonné. 6 A chaque fête, il leur relâchait un prisonnier, celui qu’ils réclamaient. 7 Or celui qu’on appelait Barabbas était en prison avec les émeutiers qui avaient commis un meurtre pendant l’émeute. 8 La foule monta et se mit à demander ce qu’il leur accordait d’habitude. 9 Pilate leur répondit : « Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? » 10 Car il voyait bien que les grands prêtres l’avaient livré par jalousie. 11 Les grands prêtres excitèrent la foule pour qu’il leur relâche plutôt Barabbas. 12 Prenant encore la parole, Pilate leur disait : « Que ferai-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs ? » 13 De nouveau, ils crièrent : « Crucifie-le ! » 14 Pilate leur disait : « Qu’a-t-il donc fait de mal ? » Ils crièrent de plus en plus fort : « Crucifie-le ! » 15 Pilate, voulant contenter la foule, leur relâcha Barabbas et il livra Jésus, après l’avoir fait flageller, pour qu’il soit crucifié.
Prédication du 14 juillet 2024 à Orvin, dans le Jura bernois, en Suisse
Avec le récit de la crucifixion de Jésus, que Pilate nomme à trois reprises « le roi des Juifs » (v.2,9,12), la violence religieuse est placée au centre de la Bible chrétienne. Toute l’histoire ancienne du peuple hébreu aboutit selon la tradition chrétienne au rejet violent de celui que les chrétiens désignent comme le Messie annoncé dans la Bible juive. Ce rejet du Christ par les Juifs justifie depuis deux millénaires la violence chrétienne contre les Juifs, coupables, dans l’inconscient collectif occidental, de déicide, du meurtre de Dieu.
L’explication psychologique de la violence religieuse
Le récit de Jésus devant Pilate dans l’Evangile de Marc offre une explication précise de la violence religieuse. En dernière instance, Pilate lance une question aux grands prêtres juifs et à la foule : « Qu’a-t-il donc fait de mal ? ». Il reçoit pour seule réponse un cri « Crucifie-le ! » (v.14). La violence religieuse est ici décrite comme un aveuglement fanatique, un mouvement de haine dénué de toute réflexion, de sorte que le romain Pilate, non impliqué dans la religion juive, apparaît plus clairvoyant que les scribes et le Sanhédrin (v.1), aveuglés par la haine.
L’analyse de Pilate nous livre une raison de cet aveuglement religieux : « il voyait bien que les grands prêtres l’avaient livré par jalousie » (v.10). Pilate se montre ici psychologue de la violence religieuse : Elle naît à ses yeux d’émotions négatives comme la jalousie, la peur, la colère, la vexation, etc. Or à l’évidence, ces émotions concernent aussi d’autres domaines des relations humaines, comme la justice, la richesse, la politique, le racisme, la famille, la sexualité, etc. Si la religion est violente, c’est donc parce qu’elle est humaine, et que nous les humains, nous devenons facilement violents sur des sujets sensibles.
La violence liée à la libération du peuple d’Israël et à la naissance du monothéisme
Le professeur d’égyptologie Jan Assmann (1938-2024), dès les premières lignes son très remarquable ouvrage Le monothéisme et le langage de la violence. Les débuts bibliques de la religion radicale (Bayard, 2018), affirme que « Le langage de la violence n’est pas spécifique au monothéisme. On le trouve aussi en abondance dans les textes des religions polythéistes » (p.11). Il spécifie plus loin : « Je n’affirme pas, comme on me l’attribue régulièrement, que le monothéisme a introduit la violence et la haine dans un monde jusqu’alors pacifique » (p.35). Il reconnait cependant que « dans la représentation biblique, l’ethnogenèse d’Israël [lors de la sortie d’Egypte] et l’introduction du monothéisme – les deux processus n’en font qu’un – sont entourés de tous les signes de la violence » (p.34).
Comment donc la violence se présente-t-elle dans le livre de l’Exode ? Tout d’abord, il s’agit de souligner, car c’est ce qui fait tout l’intérêt du livre, qu’il s’agit d’un combat asymétrique : Moïse, le faible représentant d’un peuple esclave, s’en prend à la puissance démesurée du Pharaon, fils des dieux d’Egypte. Or, tout l’enjeu du livre de l’Exode, c’est le renversement des puissances : Celui qui était supposé faible s’avère en fait le plus fort !
Moïse lutte certes pour une noble cause, indiscutable du point de vue éthique : Lui qui a échappé à la servitude par son éducation auprès de la fille du Pharaon, met sa vie en danger pour libérer de l’esclavage le peuple hébreu auquel il appartient de naissance. La civilisation égyptienne est culturellement très développée, mais profitant de sa puissance, elle oppresse et exploite une main d’œuvre étrangère à faible coût, sans droits ni salaire.
Le triple combat social, politique et religieux de l’Exode
Or, la problématique du livre de l’Exode se complique, parce que l’engagement libérateur de Moïse a lieu sur appel de son Dieu Yahvé, qui lui est apparu dans un buisson ardent (Ex 3), et lui a demandé de parler au Pharaon (Ex 6,10), ayant « entendu la plainte des fils d’Israël, asservis par les Egyptiens, et [s’étant] souvenu de son alliance » (Ex 6,5). Nous sommes donc en présence d’un triple combat superposé qui n’en forme qu’un seul : Le combat social de l’homme libre Moïse en faveur de ses frères esclaves représente en fait un combat politique entre les deux peuples-nations ennemis que sont Israël et l’Egypte, qui se double à son tour d’un combat religieux entre le Dieu de Moïse, Yahvé (Ex 3,15.18), et les dieux des «sages», «enchanteurs» et «magiciens» égyptiens (Ex 7,11). Le combat de l’Exode est donc triple, à la fois social, politique et religieux, et c’est sur le plan religieux qu’il se règle enfin en faveur de Moïse et du peuple d’Israël, vainqueurs des Egyptiens.
Déjà lors de la première rencontre de Moïse et Aaron avec le Pharaon, les prêtres de la religion égyptienne parviennent à imiter, et même à surpasser temporairement le prodige du bâton d’Aaron transformé en dragon (Ex 7,10), mais le sort bascule subitement en faveur de Yahvé, lorsque « le bâton d’Aaron engloutit [les] bâtons » des Egyptiens (Ex 7,12). Cette supériorité de Yahvé va se manifester toujours plus intensément lors des plaies infligées aux Egyptiens (Ex 7,22), jusqu’à supplanter complètement la religion égyptienne.
En effet, si les hébreux sortent libérés et enrichis d’Egypte à la suite de la dixième plaie, cette dernière fois mortelle (Ex 11,5), infligée par Yahvé aux Egyptiens, c’est bien uniquement (il faut le souligner !) parce que le Dieu Yahvé est manifestement plus fort que les dieux égyptiens. En d’autres termes, c’est la victoire de Yahvé, sur le plan religieux, qui produit la victoire politique d’Israël, qui produit à son tour la victoire sociale de Moïse. Ainsi, nous sommes donc en présence de ce qu’il convient d’appeler une « guerre de religion », mais cette dernière n’est qu’un aspect du conflit, qui mélange religion, politique et société. Nous pouvons avancer l’hypothèse sans trop de risques, que les conflits actuels entre l’Ukraine et la Russie, et entre Israël et la Palestine, sont des conflits complexes de cet ordre, mêlant des éléments religieux avec d’autres dimensions de la vie humaine.
Selon la Bible juive, la naissance symbolique du monothéisme juif, la religion de Yahvé, qui se poursuit par le don de la Loi sainte (la Thora) à Moïse sur le mont Sinaï (Ex 19 et suivants), coïncide ainsi avec la naissance du peuple d’Israël en tant que nation libre et autonome, alors nomade, en exode dans le désert. Or ce double événement fondateur est décrit en des termes faisant état d’une rare violence, jusqu’à produire de l’horreur : « sur les eaux d’Egypte – sur ses rivières, ses canaux, ses étangs, partout où il y a de l’eau ; qu’elles soient du sang ! Qu’il y ait du sang dans tout le pays d’Egypte, dans les récipients de bois comme dans les récipients de pierre ! » (Ex 7,19), et de l’effroi : « Il y aura un grand cri dans tout le pays d’Egypte, tel qu’il n’y en eut jamais et qu’il n’y en aura jamais plus » (Ex 11,6). Le film Shining, de Stanley Kubrick, sorti en 1980, qui débute avec une porte d’ascenseur libérant un flot de sang, n’est pas autrement violent que cette deuxième plaie d’Egypte.
Pourquoi le monothéisme implique-t-il de la violence ?
Posons-nous donc la question avec Jan Assmann : « Pourquoi les textes bibliques décrivent-ils la fondation et l’implantation de la religion monothéiste avec des images aussi violentes ? L’idée monothéiste, l’adoration exclusive d’un seul dieu à la place d’un monde de dieux, ou la distinction [Ex 11,7] entre la vraie et la fausse religion, entre le vrai Dieu et les faux dieux, implique-t-elle un moment de violence ? » (p.30).
Jan Assmann évoque deux explications de cette violence. Tout d’abord, il suppose que « Le saut dont il s’agit ici, la révélation dans laquelle Dieu libère d’Egypte un peuple d’esclaves pour l’introduire dans le monde totalement nouveau de l’Alliance avec Dieu, est probablement le saut le plus radical que la culture ait jamais fait ; il en va en effet du tournant du polythéisme au monothéisme » (p.28). Ce serait donc l’intensité du changement, le choc culturel en quelque sorte, qui serait à l’origine de cette violence.
Le chercheur précise alors son point de vue : « En faisant du droit et de la morale des objets de la révélation divine et en les plaçant ainsi au centre de la relation entre Dieu et le peuple, entre Dieu et l’homme, le monothéisme biblique supprime la frontière entre le rituel [religieux] et le monde de la vie quotidienne » (p.17). Tandis que les religions polythéistes concernent avant tout leurs prêtres et leurs rituels dans leur sphère isolée du sacré, tous les aspects de la vie humaine sont concernés par la volonté du Dieu unique inscrite dans la Loi sacrée. Ainsi, toutes et tous sont impliqués personnellement dans la vie de la foi, qui devient un sujet essentiel, et donc aussi particulièrement litigieux, de la vie humaine.
Selon le contexte du récit de l’Exode, le Pharaon ne s’attend sans doute pas à ce que le dieu d’un peuple qu’il a réduit en esclavage puisse lui reprocher son attitude au sujet d’une question éthique tout-à-fait extérieure à la religion, comme celle de l’asservissement d’une population étrangère. La religion égyptienne est un domaine magique réservé aux prêtres, qui n’exprime pas d’opinion critique sur les affaires politiques et économiques du royaume, tandis que la religion juive de Yahvé, le yahvisme, comporte une forte dimension prophétique, critique envers les comportements éthiques du peuple et de ses dirigeants.
Ainsi le monothéisme, en étendant sa sphère d’influence à tous les domaines de la vie, radicalise la religion en rendant chaque personne responsable de son comportement éthique devant Dieu, dans tous les aspects de sa vie. Cette extension du domaine concerné par la religion monothéiste peut conduire, selon le type de commandements enseignés et la manière dont ils sont imposés ou seulement suggérés aux peuple, à des réactions très vives et parfois porteuses de violence. Par conséquence, il n’est pas possible de formuler un jugement universel sur la religion monothéiste, dont la pertinence doit être évaluée de cas en cas, pour le meilleur ou pour le pire.
Le génie de Jésus, dans cette perspective, fut de conserver l’idée monothéiste selon laquelle tous les domaines de la vie humaine sont concernés par la Parole de Dieu, tout en transformant cette Parole, c’est-à-dire en lui donnant une forme moins juridique, moins constituée de commandements à obéir, et plus psychologique et spirituelle, en travaillant les notions de sens de la vie et de grands principes éthiques devant présider à l’évolution de l’ensemble de l’existence humaine, libérée de la rigidité de la Loi. Amen
Merci pour votre analyse, même si elle est très difficile d’accès.
L’évocation du passage du polythéisme au monothéisme me paraît très pertinente, mais à mon avis elle s’est faite de façon très, très lente et mériterait sans doute d’être affinée.
En effet attribuer tous les bienfaits à un dieu bienfaisant, et tous les malheurs à un dieu moins bienveillant, sinon malveillant, était tellement, tellement pratique, que je comprends pourquoi il a été tellement difficile de passer du polythéisme au monothéisme…
Parce qu’il faut bien le reconnaître, attribuer au même Dieu le bien et le mal qui nous arrivent est très difficile à concevoir, au point que la modernité nous en a clairement détourné (d’une telle interprétation, sinon de la notion de Dieu lui-même !).
A cheval sur deux siècles, le théologien Wilfred Monod (1867-1943) dont je porte le prénom usuel, en était encore d’une certaine manière à se demander s’il ne fallait pas différencier le démiurge à l’origine de la nature et ce Dieu qui nous a prouvé son amour sans partage en Jésus le Christ.
C’est vrai qu’aujourd’hui cela ne fait même plus question parmi les croyants que Dieu puisse être à la source du mal que nous subissons. Et étrangement, l’indifférence religieuse n’en diminue pas moins, au contraire !
Il y a par ailleurs le cas de l’Inde qui est très intéressant, puisqu’il y a toute une philosophie qui s’est développée tout à fait indépendamment du polythéisme qui continue d’y être célébré. C’est presque à n’y rien comprendre…
Disons que personnellement, j’ai énormément de mal à lire de manière littérale (je ne dis pas « littéraliste », ce qui est carrément stupide.) les textes du Pentateuque. Mais une lecture simplement littérale me paraît déjà très difficile. Car, comme l’écrivent deux théologiens éminents, tous ces textes ne sont-ils pas déjà une interprétation ?
Pour illustrer de propos je transcris ci-dessous deux textes à ce sujet (et excusez-moi par avance d’avoir été peut-être un peu « hors-sujet »), mais au moins j’aurai essayé…
Premier texte :
Nous n’avons accès qu’à la résonance, la trace de la révélation dans l’humain et non au-delà, toute la perception que nous pouvons en avoir étant déjà conditionnée par notre réalité humaine. Ce qu’on appelle révélation biblique est déjà en soi une interprétation (in « L’Ecriture vive- Interprétation chrétienne de la Bible, 2004, page 36).
Second texte :
Ces témoignages qui constituent les textes de la Bible furent toujours des interprétations, des appropriations et des actualisations – donc aussi des trahisons – des sources et événements originaires, qui restent inconnus. Les artistes contemporains ne font finalement rien d’autre que de se situer dans la chaîne interprétative des différents auteurs bibliques. Eux aussi furent des interprètes d’un fait inaugural – la révélation de Dieu parmi les humains – qui échappe à la vue. Les quatre évangélistes – Matthieu, Marc, Luc et Jean – et Paul, et avant eux les auteurs souvent anonymes de l’Ancien Testament constituent des maillons de cette tradition d’interprétation : ils ont interprété très personnellement un événement dont ils ont été les témoins ou dont ils ont reçu le récit. Mais en ce qui concerne l’événement fondateur, nous ne disposons que de leur interprétation. (in « La mystique de l’Art », 2008, page 13)
Bien cordialement,
Wilfred Helmlinger
Je viens de me relire et je constate que j’ai oublié de mentionner les auteurs de mes deux citations !
Elisabeth Parmentier, est l’auteure de la première et Jérôme Cottin, l’auteur de la deuxième !
Bien cordialement
Wilfred Helmlinger