Prédication : L’être humain est son propre juge en sa conscience

Au début de son épître aux Romains, l’apôtre Paul enseigne que les Juifs seuls ont reçu la Thora par Moïse au mont Sinaï, étant ainsi dépositaires de la Loi sacrée écrite ; mais il ajoute que tous les êtres humains, croyants et incroyants, trouvent une loi morale inscrite en leur conscience, qui tour à tour les accuse ou les conforte dans leurs actes et leurs jugements. Si les Juifs ont une Loi, tous les humains sont une loi pour eux-mêmes, ce qui les rend responsables de leurs actes devant Dieu, coupables de leurs fautes envers Dieu, et justifiables par la seule grâce divine.

Voir la liste de mes prédications ordonnées par références bibliques.

Epître de Paul aux Romains 2,1-16 – Le juste jugement de Dieu

1 Tu es donc inexcusable, toi, qui que tu sois, qui juges ; car, en jugeant autrui, tu te condamnes toi-même, puisque tu en fais autant, toi qui juges. 2 Or, nous savons que le jugement de Dieu s’exerce selon la vérité contre ceux qui commettent de telles actions. 3 Penses-tu, toi qui juges ceux qui les commettent et qui agis comme eux, que tu échapperas au jugement de Dieu ?

4 Ou bien méprises-tu la richesse de sa bonté, de sa patience et de sa générosité, sans reconnaître que cette bonté te pousse à la conversion ? 5 Par ton endurcissement, par ton cœur impénitent, tu amasses contre toi un trésor de colère pour le jour de la colère où se révélera le juste jugement de Dieu, 6 qui rendra à chacun selon ses œuvres :

7 vie éternelle pour ceux qui, par leur persévérance à bien faire, recherchent gloire, honneur et incorruptibilité, 8 mais colère et indignation pour ceux qui, par révolte, se rebellent contre la vérité et se soumettent à l’injustice. 9 Détresse et angoisse pour tout homme qui commet le mal, pour le Juif d’abord et pour le Grec ; 10 gloire, honneur et paix à quiconque fait le bien, au Juif d’abord puis au Grec, 11 car en Dieu il n’y a pas de partialité. 

12 Tous ceux qui ont péché sans la loi périront aussi sans la loi ; tous ceux qui ont péché sous le régime de la loi seront jugés par la loi. 13 Ce ne sont pas en effet les auditeurs de la loi qui sont justes devant Dieu, mais ce sont les réalisateurs de la loi. 14 Quand des païens, sans avoir de loi, font naturellement ce qu’ordonne la loi, ils se tiennent lieu de loi à eux-mêmes, eux qui n’ont pas de loi. 15 Ils montrent que l’œuvre voulue par la loi est inscrite dans leur cœur ; leur conscience en témoigne également ainsi que leurs jugements intérieurs qui tour à tour les accusent et les défendent. 

16 C’est ce qui paraîtra au jour où, selon mon Evangile, Dieu jugera par Jésus Christ le comportement caché des hommes.

Evangile de Matthieu 7,1-6 – La paille et la poutre

1 « Ne vous posez pas en juge, afin de n’être pas jugés ; 2 car c’est de la façon dont vous jugez qu’on vous jugera, et c’est la mesure dont vous vous servez qui servira de mesure pour vous. 3 Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton œil, tu ne la remarques pas ? 4 Ou bien, comment vas-tu dire à ton frère : “Attends ! que j’ôte la paille de ton œil” ? Seulement voilà : la poutre est dans ton œil ! 5 Homme au jugement perverti, ôte d’abord la poutre de ton œil, et alors tu verras clair pour ôter la paille de l’œil de ton frère.

Evangile de Luc 18,9-14 – Parabole du Pharisien et du collecteur d’impôts

9 Il dit encore la parabole que voici à certains qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient tous les autres : 10 « Deux hommes montèrent au temple pour prier ; l’un était Pharisien et l’autre collecteur d’impôts. 11 Le Pharisien, debout, priait ainsi en lui-même : “O Dieu, je te rends grâce de ce que je ne suis pas comme les autres hommes, qui sont voleurs, malfaisants, adultères, ou encore comme ce collecteur d’impôts. 12 Je jeûne deux fois par semaine, je paie la dîme de tout ce que je me procure.” 

13 Le collecteur d’impôts, se tenant à distance, ne voulait même pas lever les yeux au ciel, mais il se frappait la poitrine en disant : “O Dieu, prends pitié du pécheur que je suis.” 14 Je vous le déclare : celui-ci redescendit chez lui justifié, et non l’autre, car tout homme qui s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé. »

Prédication du 9 juillet 2023 à Péry, dans le Jura Bernois, en Suisse

Dans le livre de l’Apocalypse, le jugement divin est présenté comme un processus historique, qui se manifeste par des calamités successives, jusqu’au dénouement final de l’histoire humaine, avec l’établissement du Règne de Dieu. Dans son épître aux Romains, l’apôtre Paul parle également du « jour de la colère où se révélera le juste jugement de Dieu » (v.5), mais il en parle à partir de sa propre expérience intérieure de croyant, psychologique et spirituelle, qu’il identifie et rapporte à celle de tout être humain, comme Albert Schweitzer l’a souligné, et non au travers d’images célestes et mythologiques.

On peut affirmer, comme Luther l’a fait avec la plus grande force, que l’épître de Paul aux Romains a pour objectif premier de montrer que tout être humain, qu’il soit Juif, Grec ou païen, croyant ou incroyant, vit sa vie en étant dominé par la force du péché (Rm 3,9.20) : une force maligne, destructrice et invincible qui détruit sa vie et le mène à la mort.

Tout homme qui juge son prochain se rend inexcusable

Le péché, selon Paul, est une réalité à la fois spirituelle, psychique et charnelle, qui gagne toutes les dimensions de la vie humaine. Paul en parle comme un philosophe, en exposant des vérités générales : « Tu es donc inexcusable, toi, qui que tu sois, qui juges ; car, en jugeant autrui, tu te condamnes toi-même, puisque tu en fais autant, toi qui juges. » (v.1).

Admirons la subtilité du propos : Tout homme (« qui que tu sois ») est inexcusable non pas d’abord parce qu’un Dieu intransigeant le condamne, mais par sa propre perversion. En fait, le jugement actuel, premier et dernier, ne vient pas de Dieu, mais de l’homme lui-même, qui se fourvoie, se ment à lui-même et aux autres, en refusant de reconnaître qu’il utilise à l’évidence des barèmes différents pour évaluer les fautes d’autrui et ses propres torts. L’injustice provient de l’homme. Paul ne fait que reprendre une idée déjà formulée par Jésus : « Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton œil, tu ne la remarques pas ? » (Mt 7,3). Le péché est ici une erreur de jugement.

Mais le péché est aussi charnel : « le jugement de Dieu s’exerce selon la vérité contre ceux qui commettent de telles actions » (v.2). Les actions ici condamnées sont celles par lesquelles l’homme cherche à assouvir ses propres désirs et besoins au mépris d’autrui, en instaurant, à tous les niveaux, des systèmes d’exploitation des faibles par les forts.

La valorisation positive du jugement divin et humain

Ce premier passage (v.1-3) aboutit à un double constat étonnant : Premièrement, Dieu serait injuste en ne condamnant pas l’injustice des hommes. S’il veut être juste, il ne peut que condamner les injustes de manière impartiale, sans favoritisme. Le jugement divin perd ainsi son aspect menaçant et prend une dimension réparatrice, dans la mesure où il tend à rétablir la justice en dépouillant les exploitants et en récompensant les exploités. Deuxièmement, l’être humain, en étant jugé inexcusable en raison de la perversion de ses jugements et de ses œuvres, acquiert lui-aussi un caractère positif : sa condamnation suppose qu’il est doué d’une conscience responsable du mal.

Les deux manières dont l’homme acquiert la conscience du péché

Cet aspect refait surface lorsque Paul réfléchit à la manière dont l’homme acquiert la conscience du péché qui le condamne. En effet, on peut supposer que les autres animaux commettent des actes égoïstes comparables à ceux des humains, souvent violents envers d’autres êtres, mais contrairement aux humains, les animaux n’ont pas conscience du mal qu’ils commettent, et ne sont donc pas responsables devant Dieu comme nous le sommes.

Ainsi, Paul distingue deux voies possibles par lesquelles les humains acquièrent la connaissance du mal qu’ils commettent, et se rendent ainsi coupables, habités par le péché. Sa démonstration, une fois de plus, est assez élégante, parce qu’elle renverse la prééminence que l’on accorde généralement aux Juifs en les considérant comme les heureux élus ayant bénéficié de la réception de la Loi divine par Moïse sur le mont Sinaï.

Paul inverse cette valorisation en supposant que les Juifs ont une Loi, tandis que les païens « sans avoir de loi, [quand ils] font naturellement ce qu’ordonne la loi, ils se tiennent lieu de loi à eux-mêmes, eux qui n’ont pas de loi » (v.14). Si les Juifs ont une Loi qui révèle le péché, les manquements, les païens sont une loi pour eux-mêmes. La Loi écrite reçue par les Juifs est peut-être plus précise, plus complète, plus contraignante aussi, mais la loi que les non-Juifs (et les Juifs également en tant qu’êtres humains au même titre que les autres) portent en eux « est inscrite dans leur cœur ; leur conscience en témoigne également ainsi que leurs jugements intérieurs qui tour à tour les accusent et les défendent. » (v.15).

Ni les Juifs ni les non-Juifs ne sont exempts de tout péché

Soyons précis en observant que Paul ne dit pas que les non-Juifs sont justes, exempts de tout péché en raison de leur conscience du bien et du mal. Mais plutôt, comme le souligne Franz J. Leenhardt dans son commentaire (Labor et Fides, 1981), « l’œuvre de la loi gravée dans les cœurs manifeste son existence par les débats intérieurs qu’elle anime. […] Les arguments vont dans un sens et dans l’autre, les pensées contradictoires se débattent entre elles. […] Paul ne dit pas que les païens sont des modèles de moralité, mais qu’il leur arrive de faire les œuvres de la loi » (p.49), et globalement, qu’ils ont conscience du mal.

Paul parvient à la conclusion que « tous ceux qui ont péché sans la loi périront aussi sans la loi ; tous ceux qui ont péché sous le régime de la loi seront jugés par la loi » (v.12). La Loi révélée au Sinaï et la conscience morale ont finalement des conséquences semblables : Elles donnent à l’homme la connaissance du péché et le placent face à ses responsabilités, mais il faut reconnaître que leur perspective n’est pas très positive pour la vie humaine : Dans les deux cas, avec ou sans la Loi, les pécheurs périssent sous le poids de leurs fautes.

Le jugement par les œuvres et le salut par la foi

Cette conclusion toute négative a souvent posé un problème dans la mesure où elle semble contredire les passages de notre texte où l’apôtre décrit le « juste jugement de Dieu, qui rendra à chacun selon ses œuvres : vie éternelle pour ceux qui, par leur persévérance à bien faire, recherchent gloire, honneur et incorruptibilité, mais colère et indignation pour ceux qui, par révolte, se rebellent contre la vérité et se soumettent à l’injustice. » (v.5-8). On a l’impression, selon ce passage, que par leur « persévérance à bien faire », certains humains obtiennent le salut par leurs intentions, et se libèrent ainsi eux-mêmes de la condamnation.

La résolution de ce dilemme proposée notamment par F. J. Leenhardt me semble particulièrement pertinente ; à ses yeux « Il n’y a aucune difficulté à ce que l’Evangile, qui proclame le salut par la foi, soit évoqué dans un contexte qui affirme que Dieu juge l’homme sur ses œuvres. Ces deux doctrines ne s’excluent nullement. […] L’apôtre n’a point prêché que la justification dispensât des œuvres… » (p.50). A mon sens, la tension demeure tout-de-même entre les deux approches, mais admettons que même ceux qui recherchent la perfection morale ne l’atteignent jamais, et risquent par ailleurs de tomber dans l’orgueil.

Deux conclusions s’imposent donc : Tout d’abord, la seule solution qui s’offre à l’homme sincère et bien intentionné consiste à reconnaître humblement que son salut dépend de la seule grâce du Dieu qui pardonne ses fautes. Ensuite, ce même homme ne peut en aucune manière se considérer en mesure de deviner aujourd’hui « ce qui paraîtra au jour où, selon [s]on Evangile, Dieu jugera par Jésus Christ le comportement caché des hommes » (v.16), car nul ne pourra empêcher Dieu d’apprécier à sa manière les bonnes et mauvaises intentions des humains, quiconque soient-ils et quelle que soit la révélation dont ils ont bénéficié. Amen.

Synthèse de la prédication en quatre points positifs

Le jugement de Dieu est positif car il rétablit la justice que les hommes ont détruite.

Le jugement de l’homme est positif, car en étant conscient de sa propre injustice, l’homme se présente comme un être responsable.

Le salut de Dieu est positif, car il est gratuitement attribué par Dieu aux humains, dans son amour inconditionnel et sa grâce accordée à tous les pécheurs.

Le salut de Dieu est positif, car il est ignoré des hommes, qui ne peuvent percer le secret de son barème, qui sera révélé lors du jugement dernier, de sorte que personne n’est autorisé à juger son prochain dès à présent.

Martin Luther, Cours sur l’épître aux Romains (1515-1516), Extraits, Œuvres I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1999, p. 16-17 : Début du paragraphe [Le texte de l’apôtre s’applique aux méfaits des puissants d’aujourd’hui] (versets Rm 2,1-3)

La manière particulière dont Martin Luther interprète les premiers versets de notre texte mérite mention. J’en reproduis ci-dessous les passages les plus significatifs.

Mais il a été dit, plus haut, que l’apôtre n’a pas en vue les seuls Romains. Cette interprétation n’est donc guère digne de foi, d’autant qu’elle fait violence au texte. En admettant [pourtant] que le texte de l’apôtre puisse être entendu comme une accusation des pouvoirs constitués et qu’on puisse en faire cette application, ce qui serait conforme à la pratique de la prédication dans l’Eglise, il peut être allégué avec plus de force encore à l’encontre des puissants de notre siècle, que l’on s’étonne de voir acharnés contre les autres, jugeant leurs sujets avec sévérité alors que leur propre conduite n’est pas moins coupable: elle l’est bien davantage au contraire, et en toute impunité. Le rappel de l’apôtre les tire de leur profond aveuglement et les réveille. Demandons-nous bien si les chefs temporels, et tout autant les chefs spirituels, ne sont pas orgueilleux, débauchés, adultères et des voleurs pires [que les autres], n’obéissant ni à Dieu ni aux hommes, et fauteurs de guerres injustes, ce qui veut dire mille fois homicides, eux qui ne manquent pas de punir avec la plus grande sévérité leurs sujets coupables de telles fautes. Mais dès lors qu’il n’y a pas de juge pour eux parmi les hommes, ils s’oublient. Cependant, « ils n’échapperont pas au jugement de Dieu », comme l’apôtre le dit ici.
[…]
De quelle autorité les riches et les puissants peuvent-ils se prévaloir, pour se réserver tout le gibier et les oiseaux, afin que nul autre qu’eux-mêmes ne les capture? De quel droit? Si un homme du vulgaire faisait cela, on l’appellerait à juste titre un voleur, un ravisseur, comme s’appropriant indûment ce qui appartient à tout le monde. Mais on ne parle pas de voleurs si les coupables sont les détenteurs du pouvoir.
[…]
Semblable est le cas des puissants qui exploitent le peuple en levant des impôts sans nécessité ou qui, en changeant et dévaluant la monnaie, font tort à leurs sujets par lucre ou avarice. Est-ce là autre chose que vol et pillage des biens d’autrui ? Quelqu’un irait-il jusqu’à excuser ceux qui perçoivent même des impôts légitimes et des redevances justifiées et qui, pourtant, ne rendent pas au peuple le service qu’ils lui doivent, en le protégeant, en lui assurant la prospérité et en rendant la justice ? Ils n’ont ne vue que la domination et la quête des richesses, ne cherchant qu’à tirer gloire de leurs acquisitions, dans la plus vaine des ostentations.
Les princes de l’Eglise, eux-mêmes, se conduisent ainsi, pour ne rien dire de plus, dans leur profond aveuglement : les enfants eux-mêmes en sont témoins dans les rues. Débauche, ambition, luxe, envie, avarice, gloutonnerie et un universel mépris de Dieu : on dirait que rien de tout cela ne tombe sous le jugement de Dieu, tant ils en sont pleins. En revanche, s’il arrive à leurs sujets de toucher à leurs privilèges et à leurs ressources, même s’il s’agit de peu de choses, s’ils soustraient quoi que ce soit de leurs revenus, aucun jugement et aucune peine ne sont alors trop graves.
[…]
Mais ces choses sont tellement communes à présent que leur nombre les fait passer pour des fautes vénielles. C’est une bien terrible plaie qui est sur nous aujourd’hui, et n’est-ce pas la colère de Dieu si, par sa volonté, notre vie se passe au sein de tant de calamités, et si nous voyons la sainte Eglise dans une si triste désolation et une ruine plus grande qu’elle ne serait après le passage dévastateur d’une armée ennemie.

Note historique de ma part : Malgré cette véhémente critique de l’agir des princes de son temps, écrite aux alentours de 1515, Luther prendra dix ans plus tard, depuis 1524, la défense des princes et de leurs privilèges contre la révolte des paysans, soulevés par l’anabaptisme fanatique de Carlstadt et Muntzer (Schwärmer), en raison de leur exploitation économique au travers de taxes très élevées sur leurs produits imposées par les princes. Il s’agit de mesurer ici que dans son opposition radicale à la puissance du Pape et de l’Eglise romaine, Luther avait impérativement besoin du soutien et de la protection des princes allemands, qui seuls pouvaient assurer sa survie.

Une réflexion sur « Prédication : L’être humain est son propre juge en sa conscience »

  1. Bonjour,

    et merci beaucoup pour ce point de vue sur un aspect très pointu du message universaliste de l’apôtre Paul !

    Je me permets de signaler aussi à vos lecteurs deux entretiens riches et complémentaires de Daniel Marguerat, interrogé tour à tour sur l’apôtre par un média protestant et un média catholique, ce qui induit forcément quelques accentuations différentes dans ses réponses :

    https://youtu.be/CC3CRjanh2c, consulté ce jour

    https://www.youtube.com/watch?v=x947_9RV660, consulté il y a quelques jours.

    Bien cordialement,

    Wilfred

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.