Le cheminement spirituel selon le livre de l’Exode

Ambiguïté du livre biblique de l’Exode, en lequel Dieu use de violence envers l’Egypte pharaonique, allant jusqu’à décimer les premiers nés et l’armée d’Egypte, dans la perspective de libérer les esclaves hébreux, dont il a entendu les cris de détresse. L’Exode manifeste, en ce sens, une première version des Droits de l’homme, présentant un Dieu qui refuse radicalement que des humais en asservissent d’autres. Dans ce sens, étonnement moderne, le livre entend établir une civilisation fondée sur le respect des individus. L’étude ci-dessous entend rechercher dans ce livre un chemin de vie spirituelle chrétienne.

Voir la liste de mes prédications ordonnées par références bibliques.

Table des matières

  • Composition du livre de l’Exode
  • Démarche personnelle de libre appropriation spirituelle de différents aspects ou étapes des récits du livre de l’Exode
  • Spiritualité féministe : Entre héroïsme et amour maternel
  • Spiritualité négative : Exploitation, endurcissement, murmure, idolâtrie, divertissement
  • La Pâque juive et la Pâque chrétienne : L’interpretation chrétienne de l’Exode

Composition du livre de l’Exode

La composition du livre de l’Exode laisse apparaître très clairement un long processus d’édition au cours duquel des textes de différentes natures (récits, psaumes, codes de lois, descriptifs techniques de construction du sanctuaire, etc.) ont été soigneusement ajustés, sans pour autant gommer leurs différences de style.

Il est littérairement impossible de considérer que le texte soit d’un seul auteur, et plus impossible encore qu’il s’agisse de l’homme Moïse. Les récits de l’ensemble du livre ne sont d’ailleurs pas racontés à la première personne (« Moi Moïse, je fis partir Israël… »), mais à la troisième personne : « Moïse fit partir Israël de la mer des Joncs… » (Ex 15,22). Le fait que le livre de l’Exode soit le fruit d’une importante activité rédactionnelle ne réduit pas son importance théologique mais compromet par contre une part de l’historicité des récits, ces derniers ayant été composés et ajustés vraisemblablement des siècles après les faits.

Démarche personnelle de libre appropriation spirituelle de différents aspects ou étapes des récits du livre de l’Exode

Inviter chaque participant.e à découvrir un cheminement spirituel personnel suggéré ou inspiré par l’histoire de l’Exode constitue le but de la rencontre du 30 août 2024 dans le cadre des Décryptages bibliques de la paroisse protestante réformée de Rondchâtel, dans le Jura bernois, en Suisse. Chaque participant méditera les liens de sa propre spiritualité avec les récits de l’Exode. Afin de faciliter cette recherche, je propose ici huit aspects ou étapes spirituelles, qui diffèrent pour tout un chacun et se présentent ou non dans des ordres différents, représentés par des textes du livre de l’Exode.

  1. Révélation (Manifestation divine)
  2. Vocation (Appel divin)
  3. Délivrance ou libération
  4. Epreuve ou tentation
  5. Rencontre (Relation à Dieu ou union mystique)
  6. Législation (Lois et commandements divins)
  7. Crise (Révolte spirituelle, doute ou infidélité à Dieu)
  8. Etablissement et accomplissement (Instauration du culte fidèle)

Télécharger ici le fichier PDF contenant les huit aspects ou étapes spirituelles de l’Exode.

Le livre de l’Exode, malgré le caractère grandiose et parfois même extravagant de ses récits (un enfant d’esclave sauvé des eaux du Nil par la fille de Pharaon (Ex 2), le Nil changé en sang (Ex 7), le pays d’Egypte remplis de grenouilles (Ex 7-8), la mort de tous les premiers nés d’Egypte (Ex 12), une mer traversée à pied sec et l’armée du Pharaon noyée (Ex 14), des Tables de lois gravées du doigt de Dieu (Ex 31), etc.), se prête à une lecture spirituelle, et a d’ailleurs profondément marqué la spiritualité chrétienne déjà dans les textes du Nouveau Testament.

Remarquons que le caractère stupéfiant des miracles surnaturels du livre de l’Exode tranche avec l’histoire des patriarches d’Abraham à Joseph qui précède dans le livre de la Genèse, histoire qui ne contient pour ainsi dire aucun miracle surnaturel. Tandis que le livre de la Genèse relate l’histoire d’une famille essentiellement nomade, le livre de l’Exode relate l’histoire d’un peuple entier sédentarisé et réduit à l’esclavage qui se libère et met en marche vers une Terre promise, déplacement qui le contraint donc à un nouveau nomadisme temporaire. C’est ce déplacement dans le désert, semé de victoires, d’embuches, d’épreuves, de révélations et de délivrances, qui se prête particulièrement à être interprété comme un cheminement spirituel personnel.

Ex 3,2-5 : 2 L’ange du SEIGNEUR lui apparut dans une flamme de feu, du milieu du buisson. Il regarda : le buisson était en feu et le buisson n’était pas dévoré. 3 Moïse dit : « Je vais faire un détour pour voir cette grande vision : pourquoi le buisson ne brûle-t-il pas ? » 4 Le SEIGNEUR vit qu’il avait fait un détour pour voir, et Dieu l’appela du milieu du buisson : « Moïse ! Moïse ! » Il dit : « Me voici ! » 5 Il dit : « N’approche pas d’ici ! Retire tes sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte. »

La révélation peut être comprise comme un événement déclencheur particulier de la vie spirituelle, ou comme un ensemble d’événements, ou aussi comme l’expérience de la vie spirituelle tout au long de la vie. Ce processus diffère profondément d’un individu à l’autre. Chaque expérience religieuse a quelque chose d’unique!

« Le buisson était en feu et n’était pas dévoré » : Intensité et pérennité constituent deux caractères réunis dans le divin mais qui s’opposent dans la réalité. Moïse fait un détour: Le divin intrigue et l’homme estime justifié de faire un détour par rapport à la voie normale. L’expérience religieuse est marquée par une attraction, un étonnement et une crainte du sacré ou du divin, qui se tient à l’écart du monde.

Ex 3,9-10 : 9 Et maintenant, puisque le cri des fils d’Israël est venu jusqu’à moi, puisque j’ai vu le poids que les Egyptiens font peser sur eux, 10 va, maintenant ; je t’envoie vers le Pharaon, fais sortir d’Egypte mon peuple, les fils d’Israël. »

Ex 3,13-14 [Il s’agit aussi d’une révélation] : 13 Moïse dit à Dieu : « Voici ! Je vais aller vers les fils d’Israël et je leur dirai : Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous. S’ils me disent : Quel est son nom ? – que leur dirai-je ? » 14 Dieu dit à Moïse : « JE SUIS QUI JE SERAI. » Il dit : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : JE SUIS m’a envoyé vers vous. »

L’appel divin comporte des aspects opérationnels (j’ai vu le poids… je t’envoie vers Pharaon…) et des aspects spirituels: Dieu se présente comme celui qui EST, le fondement de l’être, et donc l’infinie profondeur et la stabilité insondable face à toutes les variations, les illusions et tous les non-lieux de la vie. Du coup la mission de FAIRE s’enracine dans la mystique de l’ETRE.

Ex 12,11-13 : 11 Mangez-la ainsi : la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main. Vous la mangerez à la hâte. C’est la Pâque du SEIGNEUR. 12 Je traverserai le pays d’Egypte cette nuit-là. Je frapperai tout premier-né au pays d’Egypte, de l’homme au bétail. Et je ferai justice de tous les dieux d’Egypte. C’est moi le SEIGNEUR. 13 Le sang vous servira de signe, sur les maisons où vous serez. Je verrai le sang. Je passerai par-dessus vous, et le fléau destructeur ne vous atteindra pas quand je frapperai le pays d’Egypte.

Ex 14,30-31 : 30 Le SEIGNEUR, en ce jour-là, sauva Israël de la main de l’Egypte, et Israël vit l’Egypte morte sur le rivage de la mer. 31 Israël vit avec quelle main puissante le SEIGNEUR avait agi contre l’Egypte. Le peuple craignit le SEIGNEUR, il mit sa foi dans le SEIGNEUR et en Moïse son serviteur.

Cet aspect me semble être le plus central et celui qui résume le mieux le message spirituel du livre de l’Exode: La vie entière est un processus de délivrances des divers esclavages qui pèsent sur nous ou que nous faisons peser sur nous-mêmes. La liberté ne conduit pas aux distractions qui remplissent le temps vide, mais elle permet l’effort de devenir soi-même, en nous libérant de toute écorce superficielle qui ne correspond pas au fond de notre être, c’est-à-dire à ce que nous sommes vraiment et qui nous satisfait au mieux.

A noter que ce n’est pas une sainteté particulièrement élevée des hébreux qui les sauve du fléau destructeur, mais bien le sang de l’agneau pascal répandu sur leur portes. La délivrance est un don de Dieu dans sa grâce, et non un mérite de nos oeuvres.

Ex 16,2-5 : 2 Dans le désert, toute la communauté des fils d’Israël murmura contre Moïse et Aaron. 3 Les fils d’Israël leur dirent : « Ah ! si nous étions morts de la main du SEIGNEUR au pays d’Egypte, quand nous étions assis près du chaudron de viande, quand nous mangions du pain à satiété ! Vous nous avez fait sortir dans ce désert pour laisser mourir de faim toute cette assemblée ! »
4 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Du haut du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous. Le peuple sortira pour recueillir chaque jour la ration quotidienne, afin que je le mette à l’épreuve : marchera-t-il ou non selon ma loi ? 5 Le sixième jour, quand ils prépareront ce qu’ils auront rapporté, ils en auront deux fois plus que la récolte de chaque jour. »

L’épreuve nous apprend à faire la différence entre vivre démuni et privé du superflu dans la souffrance et l’espérance, et vivre égaré en ignorant sa perdition, qui est une voie qui ne mène nulle part. Une étape de souffrance n’est pas forcément une étape veine, si elle conduit au murissement et au développement de nos caractères personnels. Le récit de la manne nous apprend à vivre chaque jour des bienfaits de Dieu, sans chercher à garantir et à sécuriser désespérément à l’avance le chemin qui est devant nous.

Ex 19,16-19 : 16 Or, le troisième jour quand vint le matin, il y eut des voix, des éclairs, une nuée pesant sur la montagne et la voix d’un cor très puissant ; dans le camp, tout le peuple trembla. 17 Moïse fit sortir le peuple à la rencontre de Dieu hors du camp, et ils se tinrent tout en bas de la montagne. 18 Le mont Sinaï n’était que fumée, parce que le SEIGNEUR y était descendu dans le feu ; sa fumée monta, comme la fumée d’une fournaise, et toute la montagne trembla violemment. 19 La voix du cor s’amplifia : Moïse parlait et Dieu lui répondait par la voix du tonnerre.

Ex 24,9-11 : 9 Et Moïse monta, ainsi qu’Aaron, Nadav et Avihou, et soixante-dix des anciens d’Israël. 10 Ils virent le Dieu d’Israël et sous ses pieds, c’était comme une sorte de pavement de lazulite, d’une limpidité semblable au fond du ciel. 11 Sur ces privilégiés des fils d’Israël, il ne porta pas la main ; ils contemplèrent Dieu, ils mangèrent et ils burent.

Ces deux textes exposent deux conceptions antagonistes et complémentaires de l’apparition, de la rencontre et de la révélation divine. Dans le premier texte, le peuple et la montagne tremblent devant Dieu, qui apparaît caché dans la fumée du feu d’une fournaise (cf. le buisson ardent). Dans le second texte, Dieu brille par sa limpidité et suscite un joyeux repas. Le divin est à la fois surpuissant, caché dans l’opacité, et révélateur d’une infinie transparence, pureté et paix. Cette rencontre de Dieu produit à la fois la crainte et la confiance, la peur et la joie, l’angoisse et l’émerveillement. En Dieu se trouve l’infinie réunion des contraires, du terrifiant et du paisible.

Ex 24,12-14 : 12 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Monte vers moi sur la montagne et reste là, pour que je te donne les tables de pierre : la Loi et le commandement que j’ai écrits pour les enseigner. » 13 Moïse se leva, avec Josué son auxiliaire, et Moïse monta vers la montagne de Dieu, 14 après avoir dit aux anciens : « Attendez-nous ici, jusqu’à ce que nous revenions à vous. Mais voici Aaron et Hour qui sont avec vous ; celui qui a une affaire, qu’il s’adresse à eux. »

Les monothéismes d’Abraham, judaïsme, christianisme et islam, sont appelés religions du Livre car ils ont suscité des corpus importants de textes sacrés, compris comme des enseignements de vie communautaire et personnelle inspirés par le divin. Le croyant médite les Ecritures afin d’y trouver une « nourriture spirituelle ». Mais attention : Les textes de l’Exode décrivant la révélation de la Loi au Sinaï soulignent à la fois la distance et la proximité de Dieu, la séparation et l’union mystique du croyant avec son Dieu. Cela signifie que la révélation scripturaire, qu’elle soit biblique ou coranique, n’est jamais à comprendre comme une parole me permettant de comprendre exactement la pensée divine. Dans sa quête de Dieu, autant intense soit-elle, le croyant demeure toujours à la fois séparé et en communion avec Dieu, lui au pied de la montagne, et Dieu à son sommet. La confrontation au divin me place face à mon indépassable finitude.

Proverbes 21,30 : 30 Il n’est ni sagesse, ni raison, ni réflexion en face du SEIGNEUR.

Ex 32,1-6 : 1 Le peuple vit que Moïse tardait à descendre de la montagne ; le peuple s’assembla près d’Aaron et lui dit : « Debout ! Fais-nous des dieux qui marchent à notre tête, car ce Moïse, l’homme qui nous a fait monter du pays d’Egypte, nous ne savons pas ce qui lui est arrivé. » 2 Aaron leur dit : « Arrachez les boucles d’or qui sont aux oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les-moi. » 3 Tout le peuple arracha les boucles d’or qu’ils avaient aux oreilles, et on les apporta à Aaron. 4 Ayant pris l’or de leurs mains, il le façonna au burin pour en faire une statue de veau. Ils dirent alors : « Voici tes dieux, Israël, ceux qui t’ont fait monter du pays d’Egypte ! » 5 Aaron le vit et il bâtit un autel en face de la statue ; puis Aaron proclama ceci : « Demain, fête pour le SEIGNEUR ! » 6 Le lendemain, dès leur lever, ils offrirent des holocaustes et amenèrent des sacrifices de paix ; le peuple s’assit pour manger et boire, il se leva pour se divertir.

Une cause et une conséquence de l’impossible union parfaite du croyant à son Dieu est le caractère spirituellement imparfait de l’homme terrestre, encore charnel et pas entièrement spirituel. Du coup, accepter l’imperfection de la vie humaine, et la souffrance qui s’y attache en permanence, fait partie du chemin de la foi, autant que la recherche spirituelle de signes de la conduite de Dieu dans nos vies. Nous sommes tous idolâtres, dans la mesure où, sans parvenir à nous en défaire, nous nous attachons excessivement à des biens terrestres dont notre vie nous semble dépendre entièrement, comme la santé, l’amour de nos proches, l’intimité de nos demeures, notre confort quotidien, notre réputation, autant d’idoles fascinantes qui ne sont pas Dieu.

Ex 35,1-3 : 1 Moïse assembla toute la communauté des fils d’Israël et leur dit : « Telles sont les paroles que le SEIGNEUR a ordonnées pour qu’on les mette en pratique : 2 six jours, on fera son ouvrage mais, le septième jour, il y aura pour vous quelque chose de sacré, le sabbat, repos du SEIGNEUR. Quiconque y fera de l’ouvrage sera mis à mort. 3 Où que vous habitiez, vous n’allumerez pas de feu le jour du sabbat. »

Ex 36,1 : 1 Beçalel, Oholiav et chaque sage en qui le SEIGNEUR a mis sagesse et intelligence pour savoir exécuter tous les travaux du service du sanctuaire, ceux-là exécuteront tout ce que le SEIGNEUR a ordonné. »

Ex 40,34-38 (Dernières paroles du livre de l’Exode) : 34 La nuée couvrit la tente de la rencontre et la gloire du SEIGNEUR remplit la demeure. 35 Moïse ne pouvait pas entrer dans la tente de la rencontre, car la nuée y demeurait, et la gloire du SEIGNEUR remplissait la demeure. 36 Quand la nuée s’élevait au-dessus de la demeure, les fils d’Israël prenaient le départ pour chacune de leurs étapes. 37 Mais si la nuée ne s’élevait pas, ils ne partaient pas avant le jour où elle s’élevait de nouveau. 38 Car la nuée du SEIGNEUR était sur la demeure pendant le jour mais, pendant la nuit, il y avait en elle du feu, aux yeux de toute la maison d’Israël, à toutes leurs étapes.

Nous avons ici, pour terminer le livre de l’Exode et dépasser le stade extraordinaire de la révélation sur le mont Sinaï, l’établissement d’une routine, d’un rythme, d’un modus vivendi, à la fois sécurisant et exigeant, à vivre chaque jour. L’instant et la durée sont deux approches complémentaires du temps dans la Bible : Kairos et Chronos.

Spiritualité féministe : Entre héroïsme et amour maternel

Je remercie Anne Mérillat pour la transmission de ses nombreuses notes qui m’ont permis de réaliser ce chapitre sur la féminité dans l’Exode.

La première partie du livre de l’Exode surprend par son accent nettement féministe. L’ordre de Pharaon de tuer les nouveaux-nés hébreux mâles (Ex 1,16) est déjoué par la collaboration de trois femmes, qui sauvent Moïse des eaux : la fille de Pharaon, princesse égyptienne, la sœur et la mère de Moïse, esclaves juives. Le livre veut ainsi souligner que la compassion humaine et la tendresse féminine surpassent les barrières sociales et culturelles les plus tenaces et les plus violentes. La crainte de Dieu de ces femmes rebelles, qui désobéissent à Pharaon par ruse, peut dès lors être comprise comme source de vie. Le fait que ces femmes ne soient pas seulement juives, mais aussi égyptiennes, permet de décentrer la spiritualité du seul peuple juif, et évite de diaboliser tout le peuple Egyptien, auquel le récit prête d’ailleurs un grand respect pour Moïse (Ex 11,3). Si on peut parler d’un mythe mosaïque, son idéologie est étonnamment moderne, toujours d’actualité !

Ex 2,1-10 : 1 Un homme de la famille de Lévi s’en alla prendre une fille de Lévi. 2 La femme conçut, enfanta un fils, vit qu’il était beau et le cacha pendant trois mois. 3 Ne pouvant le cacher plus longtemps, elle lui trouva une caisse en papyrus, l’enduisit de bitume et de poix, y mit l’enfant et la déposa dans les joncs sur le bord du Fleuve. 4 La sœur de l’enfant se posta à distance pour savoir ce qui lui adviendrait. 5 Or, la fille du Pharaon descendit se laver au Fleuve, tandis que ses suivantes marchaient le long du Fleuve. Elle vit la caisse parmi les joncs et envoya sa servante la prendre. 6 Elle ouvrit et regarda l’enfant : c’était un garçon qui pleurait. Elle eut pitié de lui : « C’est un enfant des Hébreux », dit-elle. 7 Sa sœur dit à la fille du Pharaon : « Veux-tu que j’aille appeler une nourrice chez les femmes des Hébreux ? Elle pourrait allaiter l’enfant pour toi. » – 8 « Va », lui dit la fille du Pharaon. Et la jeune fille appela la mère de l’enfant. 9 « Emmène cet enfant et allaite-le-moi, lui dit la fille du Pharaon, et c’est moi qui te donnerai un salaire. » La femme prit l’enfant et l’allaita. 10 L’enfant grandit, elle l’amena à la fille du Pharaon. Il devint pour elle un fils et elle lui donna le nom de Moïse, « car, dit-elle, je l’ai tiré des eaux ».

Au premier chapitre de l’Exode, on observe par ailleurs que les seules personnes nommées sont les « sages-femmes des Hébreux » (Ex 1,15ss), les autres étant anonymisées, et c’est dans ce contexte féminin que le mot Dieu apparaît pour la première fois dans le livre (Ex 1,20). Un autre texte valorise l’à-propos de la réaction féminine, et étonne par sa violence divine incompréhensible: Cippora (Séphora), la femme de Moïse, sauve la vie de son mari de l’attaque de Dieu. C’est elle qui circoncit leur fils. D’ailleurs, dans ces quelques versets, elle est la seule figure humaine à être nommée: Nous avons là l’expression de la particularité de sa relation à Yahvé.

Ex 4,24-26 : 24 Or, en chemin, à la halte, le SEIGNEUR l’aborda et chercha à le faire mourir. 25 Cippora prit un silex, coupa le prépuce de son fils et lui en toucha les pieds en disant : « Tu es pour moi un époux de sang. » 26 Et il le laissa. Elle disait alors « époux de sang » à propos de la circoncision.

Enfin, la première partie du livre de l’Exode, qui relate l’esclavage et la sortie d’Egypte, se termine également par une allusion à la joyeuse spiritualité féminine, toute empreinte de reconnaissance envers Dieu. La prophétesse Myriam chante la gloire du Seigneur, dévoilant ainsi le sens profond de la sortie d’Egypte. Le tambourin, signe de joie et d’espérance, marque l’avènement d’un nouveau peuple de Dieu.

Ex 15,20-21 : 19 Le cheval du Pharaon avait pénétré dans la mer, avec ses chars et ses cavaliers, et le SEIGNEUR avait fait revenir sur eux les eaux de la mer : mais les fils d’Israël, eux, avaient marché à pied sec au milieu de la mer.
20 La prophétesse Miryam [en français Marie], sœur d’Aaron, prit en main le tambourin ; toutes les femmes sortirent à sa suite, dansant et jouant du tambourin. 21Et Miryam leur entonna :
« Chantez le SEIGNEUR, il a fait un coup d’éclat.
Cheval et cavalier, en mer il les jeta ! »

Cette première partie du livre de l’Exode reflète donc de nombreux caractères positifs des femmes dans la Bible: inspirées, combatives, douces, séductrices, audacieuses, rebelles, fortes dans leur foi, infidèles, etc. Cependant, le ton de la Loi de Moïse, la Thora, dont les commandements sont énoncés aux chapitres 19 à 24 du livre de l’Exode, tranche complètement avec ces dispositions favorables aux femmes, et spécifie une totale soumission de la femme à l’homme, dans la mesure où cette dernière fait partie de ses propriétés, tel que cela apparaît dans l’énoncé du dernier des 10 commandements. Ici, la Bible perpétue de nombreux stéréotypes liés à une société patriarcale fondée sur la détention de l’autorité par les hommes mâles. Une telle différence d’approche de la condition féminine souligne l’origine complètement différente des textes de Loi de la deuxième partie et des récits de la première partie de l’Exode, très libéraux et favorables aux femmes.

Ex 20,17 : 17 Tu n’auras pas de visées sur la maison de ton prochain. Tu n’auras de visées ni sur la femme de ton prochain, ni sur son serviteur, sa servante, son bœuf ou son âne, ni sur rien qui appartienne à ton prochain. »

Les détails de la condition féminine dans le Code de l’Alliance, d’Ex 20,22 à Ex 23,19, appesantissent encore cette condition féminine, comparable à celle d’un.e esclave. Les quelques protections dont bénéficient les femmes (v. 8,11) font pâle figure confrontées à la totale soumission qu’elles doivent à leur maître, n’étant en possession de presque aucun droit de choisir leur destin:

Ex 21,1-11 : 1 Voici les règles que tu leur exposeras :
2 Quand tu achèteras un serviteur hébreu, il servira six années ; la septième, il pourra sortir libre, gratuitement. 3 S’il était entré seul, il sortira seul. S’il possédait une femme, sa femme sortira avec lui. 4 Si c’est son maître qui lui a donné une femme et qu’elle lui a enfanté des fils ou des filles, la femme et ses enfants seront à leur maître, et lui, il sortira seul. 5 Mais si le serviteur déclare : « J’aime mon maître, ma femme et mes fils, je ne veux pas sortir libre », 6 son maître le fera approcher de Dieu, il le fera approcher de la porte ou du montant et son maître lui percera l’oreille au poinçon : il le servira à jamais.
7 Et quand un homme vendra sa fille comme servante, elle ne sortira pas comme sortent les serviteurs. 8 Si elle déplaît à son maître au point qu’il ne se l’attribue pas, il la fera racheter. Il n’aura pas le droit de la vendre à un peuple étranger, ce serait la trahir. 9 Et s’il l’attribue à son fils, il agira pour elle selon la coutume concernant les filles. 10 S’il en prend une autre pour lui, il ne lui réduira pas la nourriture, le vêtement, la cohabitation. 11 Et s’il ne lui procure pas ces trois choses, elle pourra sortir gratuitement, sans verser d’argent.

Cet autre passage illustre la rudesse de la Loi sacrée envers tous les êtres humains, hommes et femmes:

Ex 21,22-24 : 22 Et quand des hommes s’empoigneront et heurteront une femme enceinte, et que l’enfant naîtra sans que malheur arrive, il faudra indemniser comme l’imposera le mari de la femme et payer par arbitrage. 23 Mais si malheur arrive, tu paieras vie pour vie, 24 œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, 25 brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure.

Spiritualité négative : Exploitation, endurcissement, murmure, idolâtrie, divertissement

Le livre de l’Exode présente toute une gradation de difficultés, de fautes ou de déviations spirituelles rencontrées par les différents protagonistes des récits. Le texte du Décalogue (les Dix Commandements, Ex 29), par ailleurs, ainsi que les principaux textes de Loi, sont pour la plupart des prescriptions négatives: « Tu ne tueras pas… », etc. On interdit ce qui n’est pas admis davantage que l’on indique la voie à suivre.

En des termes très durs et certes non exempts de violence, le livre de l’Exode, dans son ensemble, peut être compris comme une condamnation radicale de l’exploitation humaine. Sa trame est donc en ce sens très libérale. Le livre veut souligner que tous les peuples ont droit à la liberté de s’auto-déterminer, contre toute forme d’esclavage ou d’exploitation à des fins politiques, économiques ou militaires:

Ex 11,9-10 : 9 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Le Pharaon ne veut pas vous écouter, si bien que mes prodiges se multiplient dans le pays d’Egypte. » 10 Moïse et Aaron avaient accompli tous ces prodiges devant le Pharaon, mais le SEIGNEUR avait endurci le cœur du Pharaon, qui ne laissa pas partir les fils d’Israël hors de son pays.

Ex 14,27 : 27 Moïse étendit la main sur la mer. A l’approche du matin, la mer revint à sa place habituelle, tandis que les Egyptiens fuyaient à sa rencontre. Et le SEIGNEUR se débarrassa des Egyptiens au milieu de la mer.

Ex 14,30-31 : 30 Le SEIGNEUR, en ce jour-là, sauva Israël de la main de l’Egypte, et Israël vit l’Egypte morte sur le rivage de la mer. 31 Israël vit avec quelle main puissante le SEIGNEUR avait agi contre l’Egypte. Le peuple craignit le SEIGNEUR, il mit sa foi dans le SEIGNEUR et en Moïse son serviteur.

La question de l’endurcissement du cœur de Pharaon par Dieu (Ex 11,10, ci-dessus), qui revient régulièrement dans les récits des plaies d’Egypte, reste énigmatique. Le texte veut vraisemblablement indiquer ainsi que le destin de tout être humain reste ultimement placé entre les mains de Dieu, qui « supervise » toute chose dans l’Univers de manière incompréhensible pour nous. Du point de vue de la sagesse humaine, nous ne comprenons pas en effet pourquoi Dieu aurait lui-même rendu le cœur du Pharaon inflexible et dénué de toute pitié.

Au sujet du murmure, qui est une plainte régulière du peuple anxieux et incrédule dans le désert, dirigée contre Moïse, je renvoie à ma prédication Epreuve, angoisse et guérison. Je me limite ici à présenter une distinction importante: La résistance au murmure n’est pas une résistance contre toute forme de péché, ce qui demeure impossible à réaliser dans les limites des compétences morales humaines. L’être humain reste pécheur aussi dans la foi, et donc, la résistance au murmure consiste en l’acceptation de croire malgré la présence encore active de l’épreuve et du péché. Refuser de murmurer, c’est choisir de croire malgré tout dans une vie encore souffrante, douloureuse, imparfaite. Refuser de murmurer, c’est veiller à conserver une compassion active et souple envers soi-même, qui seule permet d’avancer avec foi en Dieu malgré les rugosités et les imperfections décevantes de notre nature et de notre environnement. Cette thématique du murmure est reprise dans le Nouveau Testament au début de l’épître aux Hébreux, qui fait de la résistance contre la tentation de murmurer une caractéristique de la foi en la grâce divine dans le cadre de la Nouvelle Alliance. Il est intéressant de constater, dans le texte ci-dessous, que la mise à l’épreuve est réciproque: Dieu met les pères à l’épreuve dans le désert, tandis que les pères mettent Dieu à l’épreuve pour le sonder.

He 3,7-15 : 7 C’est pourquoi, comme dit l’Esprit Saint :
Aujourd’hui, si vous entendez sa voix,
8 n’endurcissez pas vos cœurs comme au temps de l’exaspération,
au jour de la mise à l’épreuve dans le désert,
9 où vos pères me mirent à l’épreuve en cherchant à me sonder,
et ils virent mes œuvres 10 pendant quarante ans.

C’est pourquoi, je me suis emporté contre cette génération
et j’ai dit : Toujours leurs cœurs s’égarent ;
ces gens-là n’ont pas trouvé mes chemins,
11 car j’ai juré dans ma colère :
On verra bien s’ils entreront dans mon repos !
12 Prenez garde, frères, qu’aucun de vous n’ait un cœur mauvais que l’incrédulité détache du Dieu vivant, 13 mais encouragez-vous les uns les autres, jour après jour, tant que dure la proclamation de l’aujourd’hui, afin qu’aucun d’entre vous ne s’endurcisse, trompé par le péché. 14 Nous voici devenus, en effet, les compagnons du Christ, pourvu que nous tenions fermement jusqu’à la fin notre position initiale, 15 alors qu’il est dit :
Aujourd’hui, si vous entendez sa voix,
n’endurcissez pas vos cœurs comme au temps de l’exaspération.

C’est bien sûr dans le récit du veau d’or que le rejet de la vie spirituelle en Dieu trouve son aboutissement le plus radical, dans cette volonté de matérialiser et de rendre les dieux visibles, quitte à les représenter sous la forme de créatures mondaines. Du point de vue du Monothéisme strict qui s’exprime dans le Décalogue, le Dieu unique, Yahvé, est radicalement non représentable, et l’on ne peut pas se faire de lui une image. La signification profonde de l’idolâtrie consiste sans doute en une tentative humaine de contrôler les dieux et de ses les approprier, tandis que le Dieu d’Israël reste radicalement souverain et libre dans toutes ses orientations:

Ex 20,1-6 : 1 Et Dieu prononça toutes ces paroles :
2 « C’est moi le SEIGNEUR, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison de servitude :
3 Tu n’auras pas d’autres dieux face à moi.
4 Tu ne te feras pas d’idole, ni rien qui ait la forme de ce qui se trouve au ciel là-haut, sur terre ici-bas ou dans les eaux sous la terre. 5 Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux et tu ne les serviras pas, car c’est moi le SEIGNEUR, ton Dieu, un Dieu exigeant, poursuivant la faute des pères chez les fils sur trois et quatre générations – s’ils me haïssent – 6 mais prouvant sa fidélité à des milliers de générations – si elles m’aiment et gardent mes commandements.

Le divertissement qui est condamné dans le récit de l’idolâtrie du veau d’or (Ex 32,6) n’est pas à considérer comme une condamnation de toute forme de divertissement. Ici, il est question d’un divertissement lié au relâchement moral qui accompagne l’idolâtrie. Le peuple qui « s’assit pour manger et boire » est le peuple qui abandonne toute forme de vigilance et se laisse aller à la dépravation mentale et physique, jusqu’à nuire à sa santé et même mettre sa propre vie en danger. Le texte de l’Exode présente en ce sens une autre forme de banquet (Ex 24,11) vécu dans la présence limpide du divin, signe que toutes les manifestations de joie et de plaisir liées à la consommation des biens et des plaisirs terrestres ne sont pas condamnées par le monothéisme.

Ex 24,9-11 : 9 Et Moïse monta, ainsi qu’Aaron, Nadav et Avihou, et soixante-dix des anciens d’Israël. 10 Ils virent le Dieu d’Israël et sous ses pieds, c’était comme une sorte de pavement de lazulite, d’une limpidité semblable au fond du ciel. 11 Sur ces privilégiés des fils d’Israël, il ne porta pas la main ; ils contemplèrent Dieu, ils mangèrent et ils burent.

Ex 32,6 : 6 Le lendemain, dès leur lever, ils offrirent des holocaustes et amenèrent des sacrifices de paix ; le peuple s’assit pour manger et boire, il se leva pour se divertir.

Conclusion : Dans leur ensemble, il ne faut pas considérer les nombreuses mentions de formes de spiritualités négatives comme autant de condamnations radicales de ces déviances ou difficultés, mais plutôt comme la reconnaissance que les problèmes et les difficultés spirituelles font intimement partie de l’expérience humaine en général et dans les monothéismes en particulier.

La Pâque juive et la Pâque chrétienne : L’interpretation chrétienne de l’Exode

7 Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle, puisque vous êtes sans levain. Car le Christ, notre Pâque, a été immolé. 8 Célébrons donc la fête, non pas avec du vieux levain, ni du levain de méchanceté et de perversité, mais avec des pains sans levain : dans la pureté et dans la vérité.

Première épître de Paul aux Corinthiens 5,7-8

La principale caractéristique de l’interprétation chrétienne de la Pâque juive est l’identification du Christ à l’agneau sacrifié lors de la Pâque juive. Par conséquent, le sacrifice rituel d’un animal pratiqué par le prêtre juif se transforme en une expérience personnelle vécue par le Christ lors du don de sa propre personne en vue du salut. Ce qui était seulement une image symbolique devient une expérience fondatrice de la conscience chrétienne, le don de soi, l’offrande de sa propre vie pour le service de Dieu. Le christianisme peut ainsi être compris comme une intériorisation, une spiritualisation et donc aussi un accomplissement de la religion sacrificielle du peuple hébreu. Cette transformation spirituelle du sacrifice rituel est longuement décrite dans l’épître aux Hébreux, dont je présente ci-dessous plusieurs citations, en soulignant les concepts cléf, dont celui d’accomplissement ultime du salut joue un rôle central.

He 7,11-12 : 11 Si on était parvenu à un parfait accomplissement par le sacerdoce lévitique, car il était la base de la législation donnée au peuple, quel besoin y aurait-il eu encore de susciter un autre prêtredans la ligne de Melkisédeq, au lieu de le désigner dans la ligne d’Aaron ? 12 Car un changement de sacerdoce entraîne forcément un changement de loi.

He 8,5 : mais leur culte, ils le rendent à une copie, à une esquisse des réalités célestes, selon l’avertissement divin reçu par Moïse pour construire la tente : Vois, lui est-il dit, tu feras tout d’après le modèle qui t’a été montré sur la montagne.

He 9,1-10 : 1 La première alliance avait donc un rituel pour le culte et un temple terrestre. 2 En effet, une tente fut installée, une première tente appelée le Saint, où étaient le chandelier, la table et les pains d’offrande. 3 Puis, derrière le second voile, se trouvait une tente, appelée Saint des Saints, 4 avec un brûle-parfum en or et l’arche de l’alliance toute recouverte d’or ; dans celle-ci un vase d’or qui contenait la manne, le bâton d’Aaron qui avait fleuri et les tables de l’alliance. 5 Au-dessus de l’arche, les chérubins de gloire couvraient de leur ombre le propitiatoire. Mais il n’y a pas lieu d’entrer ici dans les détails. 6 L’ensemble étant ainsi installé, les prêtres, pour accomplir leur service, rentrent en tout temps dans la première tente. 7 Mais, dans la seconde, une seule fois par an, seul entre le grand prêtre, et encore, ce n’est pas sans offrir du sang pour ses propres manquements et pour ceux du peuple. 8 Le Saint Esprit a voulu montrer ainsi que le chemin du sanctuaire n’est pas encore manifesté, tant que subsiste la première tente. 9 C’est là un symbole pour le temps présent : des offrandes et des sacrifices y sont offerts, incapables de mener à l’accomplissement, en sa conscience, celui qui rend le culte. 10 Fondés sur des aliments, des boissons et des ablutions diverses, ce ne sont que rites humains, laissés en place jusqu’au temps du relèvement.

He 10,1 : 1 Ne possédant que l’esquisse des biens à venir et non l’expression même des réalités, la loi est à jamais incapable, malgré les sacrifices, toujours les mêmes, offerts chaque année indéfiniment, de mener à l’accomplissement ceux qui viennent y prendre part.

He 3,1-6 : 1 Ainsi donc, frères saints, qui avez en partage une vocation céleste, considérez l’apôtre et le grand prêtre de notre confession de foi, Jésus. 2 Il est accrédité auprès de celui qui l’a constitué, comme Moïse le fut dans toute sa maison. 3 En fait, c’est une gloire supérieure à celle de Moïse qui lui revient, dans toute la mesure où le constructeur de la maison est plus honoré que la maison elle-même. 4 Toute maison, en effet, a son constructeur, et le constructeur de tout est Dieu. 5 Or Moïse fut accrédité dans toute sa maison comme serviteur en vue de garantir ce qui allait être dit, 6 mais Christ l’est comme Fils, et sur sa maison. Sa maison, c’est nous, si nous conservons la pleine assurance et la fierté de l’espérance.

He 4,14-16 : 14 Ayant donc un grand prêtre éminent, qui a traversé les cieux, Jésus, le Fils de Dieu, tenons ferme la confession de foi. 15 Nous n’avons pas, en effet, un grand prêtre incapable de compatir à nos faiblesses ; il a été éprouvé en tous points à notre ressemblance, mais sans pécher. 16 Avançons-nous donc avec pleine assurance vers le trône de la grâce, afin d’obtenir miséricorde et de trouver grâce, pour un secours en temps voulu.

He 5,8-10 :  8 Tout Fils qu’il était, il apprit par ses souffrances l’obéissance, 9 et, conduit jusqu’à son propre accomplissement, il devint pour tous ceux qui lui obéissent cause de salut éternel, 10 ayant été proclamé par Dieu grand prêtre dans la ligne de Melkisédeq.

He 7,23-8,2 : 23 De plus, les autres sont nombreux à être devenus prêtres, puisque la mort les empêchait de continuer ; 24 mais lui, puisqu’il demeure pour l’éternité, possède un sacerdoce exclusif. 25 Et c’est pourquoi il est en mesure de sauver d’une manière définitive ceux qui, par lui, s’approchent de Dieu, puisqu’il est toujours vivant pour intercéder en leur faveur. 26 Et tel est bien le grand prêtre qui nous convenait, saint, innocent, immaculé, séparé des pécheurs, élevé au-dessus des cieux. 27 Il n’a pas besoin, comme les autres grands prêtres, d’offrir chaque jour des sacrifices, d’abord pour ses propres péchés, puis pour ceux du peuple. Cela, il l’a fait une fois pour toutes en s’offrant lui-même. 28 Alors que la loi établit grands prêtres des hommes qui restent déficients, la parole du serment qui intervient après la loi établit un Fils qui, pour l’éternité, est arrivé au parfait accomplissement.
1 Or, point capital de notre exposé, c’est bien un tel grand prêtre que nous avons, lui qui s’est assis à la droite du trône de la Majesté dans les cieux, 2 comme ministre du sanctuaire et de la véritable tente dressée par le Seigneur et non par un homme.

He 9,11-15 : 11 Mais Christ est survenu, grand prêtre des biens à venir. C’est par une tente plus grande et plus parfaite, qui n’est pas œuvre des mains – c’est-à-dire qui n’appartient pas à cette création-ci –, 12 et non par le sang des boucs et des veaux, mais par son propre sang, qu’il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire et qu’il a obtenu une libération définitive. 13 Car si le sang de boucs et de taureaux et si la cendre de génisse répandue sur les êtres souillés les sanctifient en purifiant leur corps, 14 combien plus le sang du Christ, qui, par l’esprit éternel, s’est offert lui-même à Dieu comme une victime sans tache, purifiera-t-il notre conscience des œuvres mortes pour servir le Dieu vivant. 15 Voilà pourquoi il est médiateur d’une alliance nouvelle, d’un testament nouveau ; sa mort étant intervenue pour le rachat des transgressions commises sous la première alliance, ceux qui sont appelés reçoivent la promesse de l’héritage éternel.

He 10,19-27 : 19 Nous avons ainsi, frères, pleine assurance d’accéder au sanctuaire par le sang de Jésus. 20 Nous avons là une voie nouvelle et vivante, qu’il a inaugurée à travers le voile, c’est-à-dire par son humanité. 21 Et nous avons un prêtre éminent établi sur la maison de Dieu. 22 Approchons-nous donc avec un cœur droit et dans la plénitude de la foi, le cœur purifié de toute faute de conscience et le corps lavé d’une eau pure ; 23 sans fléchir, continuons à affirmer notre espérance, car il est fidèle, celui qui a promis. 24 Veillons les uns sur les autres, pour nous exciter à la charité et aux œuvres bonnes. 25 Ne désertons pas nos assemblées, comme certains en ont pris l’habitude, mais encourageons-nous et cela d’autant plus que vous voyez s’approcher le Jour.
26 Car si nous péchons délibérément après avoir reçu la pleine connaissance de la vérité, il ne reste plus pour les péchés aucun sacrifice, 27 mais seulement une attente terrible du jugement et l’ardeur d’un feu qui doit dévorer les rebelles.

La nouvelle religion en Jésus est complètement délocalisée. La légitimité de l’adoration dans le culte divin ne dépend plus ni d’un lieu, ni d’un temple, ni d’un prêtre particulier, mais d’une disposition d’esprit et d’un rapport à la vérité.

Jean 4,19-26 : 19 – « Seigneur, lui dit la femme [La Samaritaine], je vois que tu es un prophète. 20 Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous, vous affirmez qu’à Jérusalem se trouve le lieu où il faut adorer. » 21 Jésus lui dit : « Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. 22 Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. 23 Mais l’heure vient, elle est là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; tels sont, en effet, les adorateurs que cherche le Père. 24 Dieu est esprit et c’est pourquoi ceux qui l’adorent doivent adorer en esprit et en vérité. » 25 La femme lui dit : « Je sais qu’un Messie doit venir – celui qu’on appelle Christ. Lorsqu’il viendra, il nous annoncera toutes choses. » 26 Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »

4 réflexions sur « Le cheminement spirituel selon le livre de l’Exode »

  1. Bonjour cher Monsieur,

    Je ne me sens pas en mesure actuellement de lire attentivement tout votre propos sur l’Exode et sur les conséquences de cet écrit sur l’évolution de la foi de chacune et chacun de nous, mais j’espère pouvoir le lire un jour en entier et à tête reposée et vous donner alors un avis circonstancié. Merci en tous les cas dès à présent pour cette réflexion si approfondie!

    Mais, sans avoir lu attentivement votre texte, je peux quand même aventurer quelques remarques :

    Tout d’abord, une petite remarque préliminaire : sauf erreur de ma part, il me semble que très peu de théologiens ou d’exégètes aient « critiqué » ce texte avant la modernité (disons avant Spinoza). Pourtant, il y a quand même une incohérence incroyable dans ce texte entre l’intention (de salut) et les faits (guerriers) qui sont relatés. Pour quelqu’un comme moi qui suis né tout de suite après la deuxième guerre mondiale, cela saute aux yeux, et cela me choque terriblement, mais je le confesse avec un peu de honte ou de gêne, c’est seulement depuis que je prends vraiment les textes bibliques au sérieux…

    Je me limiterai ensuite à trois toutes petites remarques de fond :Vous avez bien raison d’opposer dans leurs styles respectifs les textes de la Genèse et de l’Exode. Cette simple remarque met en effet en évidence qu’on a affaire, envers et contre toute affirmation contraire, à des « écrits », et il est difficile et presque impossible de ne pas penser à cette fulgurance de Paul aux Corinthiens : « La lettre tue, mais l’Esprit de Dieu donne la vie » (2 Co. 3, 6).

    Du coup, immédiatement une seconde petite remarque, encore inspirée par Paul aux Corinthiens, quand il parle de résurrection (finalement il n’en parle pas tellement que ça), et où il dit grosso modo que semés corps terrestres (animaux, psychiques!), nous ressusciterons corps spirituels (pneumatiques!). C’est dur, dur, dur de se dire cela qu’on devra tout quitter un jour, tout (s) ce(ux) qu’on aime, etc…etc…Même les montagnes, la mer, et les étoiles !!!, encore que si nous devenons des « corps célestes » (autre formulation de Paul, si je me souviens bien), on sera un peu comme des étoiles… Mais c’est ainsi aussi que peuvent penser même des athées, et on ne peut pas dire que sur ce plan là, ils soient dans l’erreur !

    Troisième petite remarque : le doute de Jésus sur la Croix , auquel font écho, il me semble, les quatre Evangiles. Jésus  « crie » qu’il se sent abandonné par Dieu ! C’est absolument horribilissime, et pour moi totalement inconcevable que cela soit historique. Mais justement, c’est peut-être parce que c’est historique que cela nous concerne toutes et tous… En fait, on n’en sait rien, et on n’en saura vraisemblablement jamais rien. En tous les cas, comme le texte de l’Exode, il me semble que ces témoignages ont presqu’à coup sûr une signification plus spirituelle qu’autre chose.

    Finalement, le Dieu d’Amour, auquel nous croyons aujourd’hui, est, tant que nous vivons, proprement impensable, comme la résurrection du Christ, ou la nôtre, d’ailleurs, sauf à convenir qu’il s’agit avant tout d’un message spirituel (mot auquel il est si difficile d’adjoindre un contenu précis). Et c’est sans doute pourquoi Paul a insisté pour dire qu’Agapè était supérieur à Pistis et Helpis…Désolé d’avoir été si long, avec si peu d’arguments, mais merci d’avance pour votre partage.

    Wilfred Helmlinger

  2. Re-bonjour cher Monsieur,

    Je suis vraiment désolé, mais il m’apparaît à présent que j’ai tout mélangé dans mon commentaire précédent !, à savoir le texte de l’Exode, et celui de Josué (avec la conquête de de la Terre Promise). Cela prouve au moins que ces textes me perturbent en raison des violences qu’on y trouve. Certes, ce n’est pas une excuse, mais cela semble aller dans le sens que les textes bibliques ne sont pas à avaler sans réfléchir ! Merci pour votre compréhension,

    Wilfred Helmlinger

  3. Cher Monsieur Helmlinger,
    je vous remercie pour votre commentaire tout-à-fait aimable sur ce thème difficile de l’interprétation de l’Exode, rendu d’autant plus épineux en lien à la guerre entre Israël et Palestine à Gaza.
    Le ton de votre réflexion diffère considérablement de celle de Monsieur Daniel Bouyssou que j’ai reçue sur Facebook. Je me permets de la reproduire ici car elle est écrite sur ma page Facebook qui appartient au domaine publique:

    « Défendre les droits de l’homme en assassinant les enfants???? Arrêtons SVP de vouloir faire dire aux textes ce qu’ils ne disent pas! Il faut replacer les textes dans leurs cadres historiques. L’image et la conception de Dieu ont évoluer. Le Dieu de l’exode n’est pas encore le « Dieu est amour » de Jean. Donc inutile de manipuler l’histoire! »

    Voici quelques remarques en rapport à cette thématique:
    – A mon sens, si le contexte de l’Exode a effectivement un rapport avec des éléments historiques (Egypte, Pharaon, esclaves, hébreux, Israël, etc.), l’ensemble du récit de l’Exode est symbolique. L’histoire de l’enfant Moïse recueilli sur le Nil, les plaies d’Egypte, le passage à sec de la mer des Joncs, etc. ont un caractère mythologique. L’Exode est une oeuvre littéraire et théologique exprimant de manière symbolique la naissance du peuple et du monothéisme juif.
    – Selon la symbolique du récit, le Pharaon ordonne le massacre de tous les enfants mâles hébreux (Ex 1,16), puis le destin s’inverse, et ce sont les premiers-nés Egyptiens qui meurent (Ex 12,29).
    – A mon sens, les personnes persécutées ou exploitées qui militent contre la dictature d’un tyran ont le droit d’espérer que Dieu les soutienne et les délivre, même si cela ne se produit pas toujours.
    – Hors de toute considération théologique, l’histoire réelle comporte des exemples de défaites finales de tyrans réfractaires à toute contestation, ayant poussé l’oppression d’un peuple à son comble.

    Pour toutes ces considérations, je renvoie à ma prédication du 14 juillet 2024 : La violence dans le livre biblique de l’Exode, et notamment aux considérations de l’égyptologue Jan Assmann que je présente dans cette prédication.

    Avec mes amitiés. Gilles B.

  4. Merci cher Monsieur pour votre réponse, avec le résumé de votre thèse à laquelle j’adhère pleinement.

    Concernant la remarque un brin énervée de l’internaute que vous citez, après qu’elle m’ait d’abord surpris, je dois reconnaître qu’elle ne m’étonne finalement pas tellement : en effet, jusqu’au siècle dernier la plupart d’entre les lecteurs de la Bible étaient fondamentalistes (excepté bien sûr concernant les tous premiers textes de la Genèse, et encore…). Ce n’est que depuis les années 1960 que cela a bien changé, et personnellement je n’ai réussi moi-même à garder la foi qu’en la « recyclant » sans répit grâce à des approches diverses, ce qui n’est pas facile, et je comprend parfaitement que tout un chacun peut se sentir un jour au bout de ce type de démarche….

    La distinction salutaire établie par Karl Popper entre science exacte (falsifiable) et science humaine (infalsifiable) nous piège en effet toutes et tous subtilement, car c’est en effet un grand paradoxe de considérer que la connaissance la plus sûre est celle qui n’est pas sûre !

    Et soit dit en passant, il me semble que c’est justement tout le problème de notre modernité… Ce que je crains en effet le plus pour ceux qui naissent en ce début de XXIe siècle, c’est que le bouton nucléaire (qui était la solution au XXe s, mais qui risque de devenir aujourd’hui Le problème) prenne définitivement la place de la toute-puissance de Dieu

    (Je ne souhaite ni n’adhère évidemment pas à cette idée, mais je veux juste juste faire allusion à un psaume (139) où la toute puissance de Dieu est affirmée haut et fort, et où l’auteur s’exclame d’ailleurs : « une science (da’’at) aussi merveilleuse est au-dessus de ma portée ! »)…

    En conclusion, persuadé personnellement que ni l’ignorance ni la connaissance n’excluent l’émerveillement, je laisserai pour terminer la parole à Karl Popper :  « Nous pouvons être différents les uns des autres dans le peu de choses que nous connaissons, mais face à notre ignorance infinie, nous sommes tous égaux »

    Bien amicalement,

    Wilfred Helmlinger

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